28 décembre à Essaouira, seul concert au féminin du festival.
Pour la deuxième soirée du 8ème festival Jazz sous l’Arganier, la Gazette a vibré. Enfin une musicienne, de grand talent qui plus est !
Encore une fois je vais enfourcher mon cheval de bataille mais force est de constater que les femmes n’ont pas la place qu’elles méritent dans le jazz. Musique de mecs à l’origine (seules les chanteuses étaient admises, on devine pourquoi) l’évolution est très lente : on commence à voir des femmes instrumentistes sur les scènes de jazz mais la barre des 30 % n’est même pas atteinte à ce jour.
Le 28 décembre donc, un très joli Trio s’est produit en première partie réunissant le Maroc, l’Espagne et le Burkina Faso.
Au piano, Abdel Wahab m’a immédiatement fait penser à Chick Corea pour son jeu percussif et sensible. Si on devait définir le mot “groove” il suffirait d’écouter les compositions originales et très inspirées de ce souriant pianiste de Tanger.
A l’appui une section rythmique irréprochable avec Luis Salto à la contrebasse et surtout Robin des Bois à la batterie : un régal. Ce jeune batteur ira loin.
Le deuxième set a été un vrai tsunami. Le célèbre guitariste Nguyên Lê a réuni autour de lui des musiciens asiatiques (Vietnam, Japon et Inde) pour produire une musique à la fois originale et compréhensible.
Je connaissais Nguyên Lê pour son travail avec la saxophoniste baryton Céline Bonacina. Connu pour ses prises de risques ce guitariste éclectique surprend toujours et ne déçoit jamais. Sa brillante improvisation à la Jimmy Hendrix ce soir là fut un clin d’oeil à Djabat où il séjourna dans les années 70.
Quant au tsunami c’est à la japonaise virtuose Mieko Miazaki qu’on le doit. Entrée sur scène très réservée mais souriante, en costume traditionnel et les mains jointes, elle s’est déchainée au fil des morceaux dans un jeu de Koto incisif et rapide, à cent lieues des musiques japonaises plutôt lentes.
Son chant nous a mis KO dans une improvisation époustouflante sur un thème de sa composition, à mi-chemin entre nature paisible et dragon déchainé. Une splendeur acoustique.
Prahbhu Edouard quant à lui jouait avec brio tant des pieds que des mains sur ses multiples instruments de percussion indienne, les tabla. L’esprit des râga traditionnels était bien là, en osmose avec l’ensemble du trio. Sans oublier l’humour omni présent de ce musicien malicieux, parlant un excellent français.
Standing ovation.
Muriel Maire janvier 2025
Photos Hugo Snellen