Trois pieds sous terre.
Á l’origine, St-Hippolyte était essentiellement catholique. Avec le temps est apparu une religion nouvelle. Celle-ci a pris l’ascendant sur la première.
C’est, en tout cas, ce que suggèrent les demandes de Catherine de Médicis.
Au moment de la construction des remparts, il est aussi question de reconstruire l’église catholique.
On imagine dès lors que les Protestants aient véritablement phagocyté le lieu de culte originel, au point de, non seulement se l’être approprié mais, aussi, le détruire une fois leur premier temple bâti.
Se pose ainsi aussi la question de l’implantation du lieu de culte un temps partagé.
De par leur rôle de trait d’union entre la vie et l’au-delà, les premiers lieux de culte jouxtaient les cimetières. Pour l’implantation de telles installations, il fallait naturellement chercher un compromis, entre la ville et l’espace disponible autour.
L’étalement urbain aidant, les cimetières finissaient souvent en ville. Faute de place alors, c’est là qu’on finissait par aussi tenir les marchés*.
Avec le projet de requalification du Plan, certains ont pris peur. Au-delà du vandalisme en gestation, resurgissait aussi le spectre de la mort. Celui-ci renvoyait aux Protestants emmurés vivants, contraints d’enterrer leurs défunts sous le Plan, du fait que cela devait se passer de nuit.
Balivernes ? Pas tant que cela.
Les premiers plans de la citadelle ne font apparaitre aucun cimetière. Par conséquent, où étaient enterrés les morts ?
Le Plan serait calé sur les dimensions d’un champ de mûriers, que le conseil politique de la ville aurait tardé à racheter à son propriétaire. L’essence renvoyant à l’Áge d’or de St-Hippolyte, il faut préciser que celui-ci attendra un siècle. Racontée tel quel, l’histoire est peu crédible.
De la même manière que Napoléon III a fait de Vercingétorix un superhéros, on peut penser que l’histoire du Plan ait pu être remaniée, au même titre qu’on en a effacé le premier temple.
C’est seulement quelque chose d’extrêmement fort qui peut justifier qu’on se soit abstenu de toucher à un pareil luxe d’espace. La mort, par exemple. Quoi d’autre ?
Á juger de l’emprise au sol de l’actuel cimetière catholique, on comprend qu’il n’y a probablement pas que des Protestants persécutés qui se trouveraient sous le Plan, mais bien des générations de Cigalois.
D’ailleurs, cette hypothèse s’inscrit dans le prolongement d’un courrier du vicaire Rochebouet, du diocèse d’Alès, qui dans son rapport évoque un cimetière attenant à l’église, avec des murs ébréchés et deux croix.
* Le Parfum (Patrick Süskind ; 1985)
janvier 2024 Jeroen van der Goot