de Saint-Hippolyte du Fort et d'ailleurs
La chute d'Icare (Pieter Bruegel l'Ancien)

Tour de Babel – IV

La chute d'Icare.

L’écriture est essentielle à notre compréhension du monde. Elle fait que nous évoluons, aussi d’une génération à une autre. Il est par conséquent important de retenir un support pérenne.

L’épopée de Gilgamesh nous est parvenue sur un support considéré comme primitif : l’argile. Le progrès aidant, nous sommes passés au papyrus et au papier. Puis, au nec plus ultra : la numérisation.

Dans l’espoir de préserver une partie de notre moi, nous jonglons ainsi, aujourd’hui, avec des disques durs et autres clouds.

Tout aussi lentement que nous avons découvert le dérèglement climatique, nous entrevoyons le risque d’un Déluge électromagnétique.

À l’occasion des dernières Saturnales (1) a eu lieu une éruption solaire, particulièrement spectaculaire. Celle-ci nous rappelle que le Soleil a, lui aussi, ses humeurs. Il est de ce fait placé sous haute surveillance.

Depuis plusieurs mois, notre étoile multiplie les bouffées de chaleur, s’approchant du pic d’activité de son [demi] cycle (2). C’est là le 25ème recensé par les astronomes, le premier de la liste remontant au milieu du 18ème siècle.

D’après les prévisions de NOAA (3), un nouveau maximum pourrait bien intervenir dès 2024.

Au début du cycle, tout semble tranquille, avec un pôle nord et un pôle sud magnétiques bien en place. Mais, progressivement, le champ se perturbe de plus en plus et d’autres pôles se mettent à apparaître, un peu partout.

Après nombre de naissances et de ruptures de boucles magnétiques, le Soleil retrouve son calme avec, toutefois, des pôles magnétiques nord et sud inversés.

Le Soleil est fait de plasma, c’est-à-dire de gaz ionisé. On peut le comparer à une grosse boule de particules électriquement chargées. Le tout est agité d’un mouvement très compliqué. Non seulement le Soleil tourne sur lui-même, mais la rotation est différente à l’équateur et aux pôles. Et, en plus, il y a des mouvements verticaux, avec de la convection (des particules qui montent et qui descendent) et une ébullition de surface.

Les coups de sang de notre étoile ne sont cependant pas nouveaux. Au niveau d’arbres anciens, voire fossilisés, on a effectivement relevé des traces d’éruptions solaires remontant à l’année 774 (4) de notre ère ainsi qu’à 12 300 ans avant celle-ci (5).

Là où il convient d’au moins sourciller, c’est que le monde d’en bas a, depuis, considérablement changé. Avec les temps modernes, l’Homme est non seulement devenu fortement dépendant de l’électricité et de l’électronique, il a aussi considérablement maillé la planète, sous la forme d’un réseau conducteur quasi continu (6).

Semblent particulièrement exposés, les satellites de communication et de localisation (GPS).

De ce fait, les militaires, les opérateurs de satellites, l’aviation, les compagnies électriques sont sur le pont, et les compagnies d’assurances dans les starting-blocks.

En mesurant les flashs de lumière au droit des étoiles de type solaire, l’astrophysicien japonais, Kazunari Shibata, étudie des phénomènes qui vont au-delà de l’évènement de Carrington (7). Il en est ainsi venu à la conclusion qu’il se produit un événement, 100 fois plus puissant que la tempête solaire de 1859, tous les 800 ans, et 1000 fois plus puissant tous les 5000 ans.

On sait ainsi, qu’un jour, il arrivera quelque chose d’énorme… (8)

  1. Saturnales : fêtes païennes célébrant le retour du Soleil. L’évènement ici évoqué s’étant produit le 31 décembre, à 22 h 55 (heure de Paris).
  2. Demi-cycle solaire : 10 à 13 ans. Compter le double pour que les pôles se remettent à leur place initiale (Jean Lilensten ; CNRS).
  3. L’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique.
  4. Fusa Miyake et al. étude portant sur des cèdres japonais.
  5. Edouard Bard et al. étude portant sur des arbres subfossiles, dans la région de Gap.
  6. Lignes à haute tension, caténaires, rails, pipelines, tuyaux…
  7. Tempête solaire de 1859 qui a, notamment, eu de graves conséquences sur les réseaux télégraphiques
  8. Jean Lilensten, astrophysicien.

Crédits : cette chronique s’appuie sur, et reprend partiellement, deux articles de Pierre Barthélémy, publiés par Le Monde (16/10/2023, 29/01/2024).

Jeroen van der Goot  février 2024

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